Quelle pourrait bien être l'arrière-pensée de qui miniaturise le réel? Qui parcourt une exposition de Marc Henrotin pense d'abord ne rencontrer que des maquettes. Le voici -naïvement- rassuré. Il se croit devenu Gulliver à Lilliput. Il s'attendrit sur ce qu'il prend d'abord pour un jardin japonais. Ou sur cette tour de Babel que l'on dirait édifiée sur des pilotis fins comme des allumettes. Il faut y prendre garde. Que le visiteur géant se penche sur ces graciles constructions où l'ébène relaie le corail, et l'acier le verre, et le voici capturé par ce monde nain. Son œil a été trompé. Il n'en sortira pas indemne. C'est la ruse du sculpteur. Ce n'est que par préciosité qu'il œuvre ainsi à échelle réduite. C'est pour mieux protéger ses rêves. Pour apprivoiser ses cauchemars. Emprisonner ses fantasmes dans des cages grandes comme des boites à bijoux. Il peut proclamer le triomphe de la vie contre la mort, c'est à ce prix! Ces paysages minuscules ont vu passer des apocalypses douces. Délices et supplices cohabitent en ces jardins. Le vide investit le Délices et supplices cohabitent en ces jardins. Le vide investit le sujet : celui-ci ne va-t-il pas, dans un instant s'y déchirer ou s'y dissoudre? Voyez plutôt comme l'artiste (se) joue de ses matériaux. C'est en épuisant chacun d'eux, successivement qu'il progresse, recourt à une technique nouvelle puis l'abandonne à son tour. Mais c'est le métal qui partout se cache. Comme pour mieux dissimuler sa résistance. Ethnologue du végétal. Dompteur de chimères. Abstinent que menacerait le delirium tremens. Henrotin est un Bosch menu. Les défoliants d'Hiroshima ont dénudé ses arbres sans altérer son amour des choses terrestres. Il a célébré avec le visible de fragiles mais inusables noces.

Pierre Mertens

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© marc henrotin - novembre 2012